La Fosse Dionne
La source de la Fosse Dionne a toujours été un rêve, un fantasme. Bien évidemment, l’interdiction d’y plonger a contribué à entretenir le mythe. Elle a été imposée en 1996, à la suite d’un accident mortel survenu lors de la remontée, à la sortie d’e la dernière étroiture. Je commençais la plongée souterraine, depuis quelques mois et cette source déjà légendaire devenait interdite, inaccessible. Nous avons passé des heures à en parler, à échafauder des stratagèmes afin d’y plonger en « pirates », sans jamais passer à l’acte. La fascination exercée par cette source remonte sans doute à la nuit des temps. Les premiers humains, à la préhistoire, se sont évidemment arrêtés au bord de la source, pour y boire et ils ont dû comme nous aujourd’hui, peut être plus encore, ressentir un frisson d’inquiétude à la vision du porche, de l’ombre sombre qui marque l’entrée du monde souterrain. La fascination, encore aujourd’hui touche tout le monde et pas uniquement les plongeurs. Le lieu a évidemment bien changé depuis les temps reculés des premiers hommes. Sa localisation, son architecture, son histoire, ses légendes encore vivaces et la genèse de son exploration contribuent à forger et à entretenir sa légende. Quelques images tournées pour une émission de télévision et surtout la possibilité évoquée par madame la maire pour une éventuelle reprise des plongées, ont immédiatement tilté dans ma tête. Partant du principe « qui ne tente rien n’a rien », j’ai constitué un dossier et envoyé ma demande à la mairie de Tonnerre et à Madame Dominique Aguilar. Ce courrier était plus une proposition qu’une requête. Je proposais plus que je ne réclamais, de nettoyer la vasque, d’enlever les vieux fils et d’en poser un neuf, de sécuriser l’accès avec une corde, d’effecteur la topographie de la cavité, de réaliser des prises de vues, des photos et des vidéos. Et avec tout ça, de réaliser des articles et éventuellement des reportages. Et bien évidemment, comme d’habitude, de tout mettre à disposition de la mairie et de la communauté. Après de long mois d’attente, plusieurs relances et grâce à l’appui insoupçonné d’une adjointe au maire, Madame Caroline Coelho, un peu spéléo elle aussi, j’ai obtenu un rendez-vous en mairie pour parler du projet. Quelques semaines plus tard, je recevais l’accord et enfin, après tant d’années de rêve et d’attente, je pouvais enfin m’immerger dans la mythique, la fascinante Fosse Dionne. Je pense ne jamais avoir autant écarquillé les yeux lors d’une plongée que lors de ma première immersion. Et comme promis et même au-delà de nos attentes, tout ce qui avait été proposé a été en grande partie réalisé. De beaux reportages ont été diffusés, à deux reprises, j’ai eu l’immense plaisir de partager cette passion et ces découvertes lors de réunion avec les habitants de Tonnerre et de la région. Et c’est sans doute ceci la plus belle récompense, offrir aux personnes qui n’iront jamais sous terre, ce privilège et leur montrer l’invisible. Aujourd’hui, le projet n’est pas terminé, loin de là. La topographie et le nettoyage de la galerie profonde reste à faire et la galerie continue. Mais à la suite des périodes de canicules et de sécheresse, l’eau ne coule plus où à peine. La grande pente d’entrée a glissé vers le bas, bouchant presque totalement le passage dans les deux étroitures. Devant la grande instabilité de la pente, je préfère attendre un peu que des jours meilleurs, des crues hivernales remontent un peu tous ces cailloux. Et surtout que la pression de l’eau, la force du courant stabilisent un peu l’ensemble. L’avantage avec le monde souterrain est son évolution lente, hors de notre rythme d’humain. Et si ça n’est pas demain, ça sera un peu plus tard, car la grotte, la source, la galerie sera là encore dans des centaines d’années.